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Mise en images

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 • Interactions avec le texte
L'arc-en-ciel est un mot image au sens où dès le cycle 1 sa signification s'épaissit au fil des expériences perceptives, la magie de l'arc-en-ciel après l'orage, les tracés avec un bouquet de crayons dans la main pour le reproduire et des lectures dans lesquelles à la suite de l'arche de Noé l'arc-en-ciel fait signe.
La représentation de l'arc-en-ciel est aussi un héritage des temps moyenâgeux : Jean Perrot, dans son petit traité de l'arc-en-ciel, (p175-204 in Art baroque art d'enfance PU Nancy 1991), remarque que l'arc-en-ciel a quelque chose du divin, a à voir avec la puissance d'un créateur. Il note cependant comme d'autres l'ont remarqué avant lui la relation de l'arc-en-ciel avec le nuage dont dépend la création de la couleur blanche.
Dans l'album de Peter Sís, il faut chercher l'image de l'arc-en-ciel car n'y apparaît tout d'abord que le nom du héros, le rhinocéros blanc et ses amis les oiseaux arc-en-ciel. Les couleurs des oiseaux qu'ils portent sur son dos seraient-ils à l'origine de son nom alors que son habit, blanc immaculé, n'est pas représentatif de son espèce ? Mais ne faut-il pas du blanc pour que les couleurs prennent toute leur valeur ?
L'image de l'arc-en-ciel n'apparaîtra d'abord que sous la forme du nuage d'abeilles se levant de l'arbre mort lui donnant ainsi vie, le ciel dans le même temps se chargeant de zones de couleurs. Ce nuage s'arrondit formant un arc et ce n'est qu'à la dernière page qu'apparaît la forme traditionnelle de l'arc-en-ciel, derrière les montagnes, au dernier plan.
On reconnaîtra aussi dans les pages de garde les traces de l'arc-en-ciel entre Terre et Ciel dans lequel, comme flottant entre deux eaux, le rhinocéros Arc-en-ciel ailé car chevauché de ses trois oiseaux arc-en-ciel.
On voit donc comment le thème du nuage et de l'arc-en-ciel est repris et transformé par Peter Sís, perdant quelque peu son lecteur dans un labyrinthe de références et d'allusions à la création du monde.
Les couleurs jouent un rôle essentiel dans la mise en scène du récit : elles rythment la quête du rhinocéros qui perd un à un ses trois amis. Le bleu du lac réfléchissant la rangée d'arbres et le bleu du ciel, attire et capte l'oiseau bleu qui s'y mire irrésistiblement. Les régimes de bananes enserrent l'oiseau jaune inattentif aux lianes qui serpentent. Quant à l'oiseau rouge, il se plaît à sauter sur les coquelicots (qui n'en sont pas d'ailleurs) mais dont chacun sait qu'ils sont toujours rouges !
L'image dont toutes les couleurs sont atténuées presque grises, se scinde alors en deux vignettes allongées accentuant la longueur du trajet et la charge émotive de la quête. Il faut remarquer aussi ce fil rouge, lien tenu avec le dernier ami, ou noir qui marque dès le début le destin du rhinocéros dans la page et dans le récit. Arrivé près de l'arbre le corps à moitié enfoncé dans le sol, le trait étant devenu un véritable sillon, le rhinocéros semble à bout de forces. Mais la trace prépare le retour.
Pourtant, poursuivi par les abeilles qui lui redonnent vie, il retourne au galop vers la vallée, repassant dans les paysages précédents qui ont perdu leur quiétude. Il traverse à nouveau le vert de la vallée, en arrière plan, les montagnes blanches et le ciel, du blanc vers le bleu. La scène terminale fait apparaître deux bandes de couleur, verte et rose, avec en arrière plan l'arc-en-ciel, la sérénité retrouvée.
• Choix plastiques
Les effets produits par les techniques picturales de Peter Sís contribuent à l'atmosphère de son récit :
  • La trame toujours apparente donne une image plus éloignée du réel, marquée par le temps et esthétiquement chargée de nuances colorées ;
  • L'usage de la répétition d'éléments qu'affectionne le courant surréaliste, associé à une diminution progressive de la taille de ces éléments (arbres, coquelicots) construit des espaces infinis hors de la dimension humaine. L'image ne sert pas ici le réel, elle se veut plus conceptuelle, obligeant le lecteur à voir plus que la représentation des éléments qui la constituent ;
  • L'image est toujours structurée par différents plans juxtaposés, la perspective traduite par la diminution de la taille des éléments. L'½il, attiré par le point focal que représente la tache blanche du rhinocéros est conduit vers le dernier plan , vers l'infini. La ligne d'horizon parfois en arc (la Terre) donne au récit une valeur universelle.
  • On remarquera aussi les ombres portées, la lumière venant de l'arrière-plan ; cette technique renforce le fait que le déroulement temporel du récit est basé sur la succession des évènements et non pas sur un marquage précis dans une durée à échelle humaine (la journée par exemple).
  • Enfin, le lecteur averti aura interprété le déplacement non conventionnel du rhinocéros de la droite vers la gauche (première partie du récit) comme contraire aux besoins du héros, le sens du déplacement s'inversant et le mouvement s'accélérant lorsque les personnages ont compris qu'ils étaient bien plus heureux tous les quatre dans leur vallée.


Last modified 2007-01-19 10:52