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Progression

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En cycles 1 et 2 se construisent les premières représentations de la poésie : la responsabilité de l'école est engagée.

À l'école maternelle, le patrimoine des comptines déjà très souvent exploré reste souvent dans les mains du maître : or la production éditoriale aujourd'hui nous offre un corpus tous les jours enrichi de mises en images (albums), de mises en voix et en musique (Cdlivre) qu'il est nécessaire que les jeunes élèves s'approprient. Attention cependant à ne pas tomber dans les projets mercantiles de collections de " nouvelles comptines " n'ayant pas les atouts ni les atours des comptines traditionnelles fortes d'une histoire culturelle parfois millénaire. On aurait tort cependant de croire les jeunes élèves incapables d'entendre et d'apprécier les textes poétiques, d'entendre dire en direct par un adulte lisant à voix haute ou d'écouter sur support enregistré des fragments de poèmes. La consigne d'écoute se différenciera selon qu'il s'agit de première écoute ou d'une réécoute : demande de rappel de fragments d'énoncés, de transcodage par le mime, les arts visuels, la parole…

En cycle 2, l'ouverture à tous les genres poétiques est indispensable et doit être réfléchie par l'équipe de cycle : poésie visuelle, poésie sonore et autres formes poétiques, poésie du moyen âge à nos jours, poésie de toutes cultures…Certaines collections paraissent parfaitement adaptées à des lectures autonomes dès le cycle 2 : enfance en poésie chez Gallimard, Les livres d'or des poètes chez Seghers, Les petits géants et les Anthologies de Rue du monde , mais aussi chez les éditeurs de poésie certains titres de la collection Poèmes pour grandir au Cheyne ou Au revoir les enfants chez Tarabuste, Le farfadet bleu au Dé bleu. Nous relaterons brièvement ici deux expériences l'une en cycle 2 avec " Il pleut des poèmes, anthologie de poèmes minuscules " Rue du monde et l'autre en CE2 à la rentrée avec " Menu, menu " de Jacques Roubaud, Enfance en poésie, Gallimard.

" Il pleut des poèmes " présente des formes courtes, regroupées par cinq ou six, disposées à l'oblique, sur la double page dont l'illustration figurative renvoie à un ou plusieurs poèmes.
Objectif prioritaire : élargir les représentations de la poésie souvent induites par la " récitation " en se construisant une pratique de lecteurs de poèmes
Activités possibles :
Chacun verbalise ses propres stratégies de lecture dans l'anthologie.
Dans la double page : jouer à pareil / pas pareil avec les mots, les textes et les images ; donner un titre à chaque double page.
Réaliser une affiche sur laquelle seront présentés des poèmes reclassés extraits de l'ouvrage (copier des poèmes, les classer, les disposer selon une intention).
Dire à haute voix un poème qui plaît : écrire la suite ; la lire, la dire à haute voix …lui associer une image, une musique …enregistrer sur une cassette.
Reprendre une double page ; rechercher d'autres poèmes pouvant s'y inscrire (voir liste des recueils desquels sont extraits les poèmes de la présente édition)

" Menu, menu " a été présenté dans une classe de CE2. Les élèves travaillaient par groupe avec une copie d'un des textes du recueil. Il s'est avéré qu'il aurait été plus judicieux de leur donner aussi un recueil par groupe, de manière à ce que le simple feuilletage donne à voir les ressemblances et les relations entre les poèmes. Quatre textes ont fait l'objet de mises en voix préparées dans chaque groupe. Les échanges entre les élèves ont porté rapidement sur les significations qu'ils attribuaient au poème compte tenu de l'objectif fixé : le dire devant les autres en utilisant si besoin des artifices scéniques. La question de la mémorisation n'a pas fait obstacle au travail de diction largement suffisant pour des CE2 en début d'année.

En bref : les maîtres concentrent souvent leurs efforts sur un objectif légitime de " faire comprendre " le texte du poème. Or l'expérience montre que dès les petites classes, la lecture et l'écoute du poème cultivent la sensibilité au langage sans que soient nécessaires des activités formelles d'explication de mots. À travers des consignes pragmatiques de mise en voix ou de mise en jeu, de mise en relation avec d'autres textes, de copie, le poème vit dans et par la communauté d'élèves. Par contre, en fonction des dispositifs mis en place dans la classe et dans le cycle, l'expérience du langage se développera dans toutes les activités d'écritures personnelles permettant l'exploration du fonctionnement des textes (Serge Martin, dans Actes de lecture n°76, décembre 2001 p81) : lire crayon en main pour relier, surligner, paraphraser…, écrire dans un journal personnel de lectures, annoter un carnet de savoirs, … dont on ne saurait exclure le genre poétique.

À l'école maternelle, il est fréquent de " coller " la poésie ou la comptine connues par la classe dans le cahier de vie ou dans un cahier " de poésie " : chaque élève apprend à l'identifier dans sa forme écrite et par les illustrations que le maître y adjoint. Malgré leurs bonnes intentions, ces pratiques enferrent la poésie dans les représentations du beau, dans le rituel de la récitation. Osons d'autres pratiques, celle des collections par exemple. Les collections appartiennent au répertoire des jeux de l'enfance ; alors collectionnons les poèmes de multiples façons (dans des flacons, dans des boîtes, dans des classeurs, avec ou sans images, ou encore dans un fichier multimedia ou sur une bande audio) en fonction de leur pouvoir d'émotion, de leurs couleurs et de je ne sais quel autre critère (les enfants en trouveront)… L'affichage de textes poétiques dans un espace réservé dans la classe offre une autre voie à l'appropriation singulière et au partage de la poésie à l'école maternelle.

Quelques recueils de cycle ont fait leur apparition, trop souvent conservés par les maîtres de peur de leur éventuelle dégradation par des mains trop empressées ou insuffisamment respectueuses. C'est qu'en effet, la pratique de la poésie à l'école est trop souvent guidée par l'idéologie du beau au détriment d'une appropriation active par l'élève et au risque d'une pratique d'exclusion de ceux qui n'en seraient pas dignes au même titre d'ailleurs que d'autres pratiques artistiques.
Les thèmes et formes récurrents liés à nos représentations de l'enfance privilégient le bestiaire, le narratif, la rime. Pourquoi ne pas l'élargir dès l'école maternelle à tous les fondamentaux qui taraudent l'espèce humaine : la vie, la mort, l'amour, la haine, la place de l'humain dans l'ordre de la nature… à la diversité des formes poétiques comme les haïku (voir l'excellent recueil Le petit cul tout blanc du lièvre de Thierry Cazals illustré par Zaü chez mØtus 2003), à l'exploration du langage telle que l'offre Louis Calaferte dans Ricroléphant et Cie chez Tarabuste 1998.
En cycle 2, peuvent débuter la création d'anthologies, la copie personnelle de fragments, l'enregistrement de mises en voix dans un corpus présenté par l'élève en BCD ou dans l'espace bibliothèque de la classe. Ce corpus évolue au rythme de la classe et des propositions du maître.

Avec les plus jeunes, la mémoire du poème se travaille dans les mises en voix et mises en scène conjointes du maître et des élèves : les mots du poème circulent de bouche à oreille, à voix basse, l'élève à son tour devant les répéter à voix haute… La mémorisation s'appuie sur les technologies disponibles (TICE) donnant à l'élève le pouvoir de dire et de s'entendre dire, d'écouter, de réécouter, d'effacer et de recommencer, mais aussi de copier, de faire l'expérience de l'espace du poème, de sa graphie.

Last modified 2005-10-03 14:28