Mise en texte
Le texte installe la scène du réveil du personnage comme un rituel auquel participe le jeune lecteur. « Chaque matin » cité dans les deux premières doubles pages signifie au lecteur que le scénario se reproduit à l’identique tous les jours.
Le narrateur nomme les actions d’une maman lapin et la mère initie un dialogue avec Tommy le bébé lapin .
L’énoncé « Il est grand temps de te lever, Tommy. » fonctionne comme évaluation par la mère de la situation, sans réponse de la part de Tommy qui n’est pas visible dans l’image. Le texte seul construit la réalité du personnage.
« Tommy, où es-tu ? » Tommy ne répond pas et l’action de la mère qui tire un peu la couverture ne suffit pas à dévoiler la présence de Tommy.
La mère s’adresse alors aux différents personnages doudous qui se réveillent l’un après l’autre. Le dialogue entre la mère et chaque doudou se reproduit à l’identique
« Bonjour, Monsieur Pingouin, dit Maman.
Est-ce que tu as vu mon petit Tommy ?
Hum, répond le pingouin qui se tourne sur le côté. »
Cette écriture classique rompt avec les habitudes actuelles de la mise en dialogue dans les albums avec disparition des verbes de parole et report de l’élaboration des significations du côté de l’image. Ici, le narrateur reste présent, les personnages qui parlent sont nommés et leur action est évaluée.
La progression du récit est lisible à travers la description de l’action effectuée par le narrateur « demande maman qui tire un peu plus (encore un peu plus) sur la couverture », puis « qui enlève la couverture ».
La résolution de l’énigme que l’on pourrait formuler par - Tommy ne répond pas, peut-être qu’il n’est pas dans son lit ? – passe par la réponse de Tommy : Bonjour maman !
Or la lecture préalable du titre Bonjour Tommy devrait ôter toute inférence de ce type. Tommy est bien là mais ne répond pas.
Les stratégies de présentation de cet album à des très jeunes lecteurs devront prendre en compte cet obstacle en décidant dans le déroulement de la lecture de ne pas s’attarder sur la première de couverture qui chronologiquement se situe en fait après la dernière phase de l’album : Tommy est dans les bras de sa maman. Au cours de la lecture et en fonction de l’image qui ne révèle pas directement la présence de Tommy mais la suggère de mille et une manières, l’adulte sollicitera les jeunes lecteurs en les questionnant : « Où penses-tu que se trouve Tommy ? Pourquoi ne répond-il pas à sa maman ? »
La fin de l’album et le retour sur la première de couverture permettront de lever toute ambiguïté et d’interpréter l’histoire comme un jeu ritualisé entre la maman et son enfant, reprenant le scénario originel du « Coucou le voilà ! » décrit par Freud.